...l’hémochromatose
Douleurs dans les mains, fatigue chronique inexpliquée ou encore un état de détresse morale et psychologique : voici quelques unes des manifestations cliniques tardives liées au retentissement de la surcharge en fer sur certains tissus et organes. L’hémochromatose génétique (autosomique récessive) est une maladie méconnue mais aussi la plus fréquente en France (avec une incidence estimée à 1/300 cas), caractérisée par une hyperabsorption du fer par l’intestin entraînant son accumulation dans l’organisme.
A quoi est due l’hémochromatose génétique ?
Dans 90% des cas, une mutation (homozygote) de type C282Y est identifiée au niveau du gène HFE codant pour l’hepcidine, protéine qui contrôle la sortie du fer des entérocytes (cellules intestinales) et des macrophages vers le plasma. La baisse anormale de l’hepcidine favorise l’augmentation du fer plasmatique avidement capté par le foie, le cœur ou encore le pancréas, organes cibles privilégiés de la surcharge en fer systémique. Deux situations correspondant à des surcharges martiales HFE non liées à une homozygotie C282Y ont été décrites dans la littérature : l’hétérozygotie composite (C282Y/H63D) dont l’expression clinique reste cependant discutée et l’homozygotie H63D (exceptionnellement en cause). A noter que l’hétérozygotie simplex, C282Y ou H63D ne donne lieu à aucune surcharge en fer cliniquement significative. Enfin, d’autres mutations (hémojuvéline, récepteur sérique de la transferrine ou encore ferroportine) peuvent se combiner avec les précédentes et accentuer le tableau de surcharge en fer [1] ; elles ne seront pas abordées dans le présent exposé.
Quels sont les signes cliniques ?
Pendant les vingt premières années de la vie, le fer s’accumule dans les organes : cette phase de latence clinique, parfaitement tolérée, n’est que rarement détectée. Lorsque la phase symptomatique apparaît (après 20 ans chez l’homme et 35 chez la femme), les patients peuvent présenter différentes manifestations :
Les complications surviennent alors entre 45 et 60 ans : l’asthénie chronique et intense peut conduire à l’arrêt de l’activité professionnelle, la surcharge ferrique au niveau du foie peut être responsable de fibrose et de cirrhose, mais aussi diabète, insuffisance cardiaque… Un dépistage précoce et la mise en route d’un traitement permettent généralement aux patients d’avoir une espérance de vie normale. En revanche, si certains symptômes s’atténuent avec l’instauration du traitement (asthénie, troubles cardiaques, mélanodermie…), d’autres s’amendent plus difficilement une fois installés (diabète, douleurs articulaires)
Comment diagnostique-t-on la maladie ?
Compte tenu de la discrétion et de la non spécificité des symptômes cliniques, ce sont souvent les anomalies biologiques qui feront évoquer le diagnostic. Dans un premier temps, l’étude du bilan martial va confirmer la surcharge en fer : il convient d’effectuer un dosage de la ferritine sérique ainsi que la mesure du coefficient de saturation de la transferrine ; le fer sérique a peu d’intérêt car son dosage est peu sensible et sa concentration varie au cours de la journée [2]. Lorsque la ferritine est élevée et le coefficient de saturation supérieur à 45%, il est nécessaire de rechercher la mutation C282Y du gène HFE (après exclusion de toutes autres étiologies pouvant entrainer cette augmentation).
Quels sont les traitements ?
Simple, efficace, bien toléré et peu coûteux, le traitement repose sur des saignées hebdomadaires durant 1 à 2 ans en fonction de la surcharge en fer. L’efficacité du traitement est évaluée par la ferritine (objectif <50 µg/l) et la tolérance biologique, par l’hémoglobine qui doit rester supérieure à 11g/dl. Les chélateurs du fer ne sont utilisés que dans les rares cas de contre-indications aux saignées. Au quotidien, il n’y a aucun régime alimentaire à suivre si ce n’est d’éviter de prendre du fer ou de la vitamine C sous forme pharmaceutique ; il est recommandé, en revanche, de boire du thé…
S Robin
[1] HAS,Prise en charge de l’hémochromatose lié au gène HFE, juillet 2005
[2] Optionbio, septembre 2010,n°441